Reprogrammer le cerveau : comment chasser les mauvaises habitudes

Nous déplorons tous nos mauvaises habitudes, mais avant de pouvoir les chasser, nous devons repenser notre approche à leur égard. Pour commencer, même les mots «∘bon∘» et «∘mauvais∘» évoquent des sentiments de bien ou de mal qui, à leur tour, nous mettent sous une énorme pression. Nous avons peur de déraper. Vous avez du mal à vous mettre au sport ou à éviter les écrans avant de dormir ? Vous en vouloir à ce sujet est presque aussi paralysant que l’habitude dont vous essayez de vous défaire. Cependant, avant même de tenter de reprogrammer votre cerveau vers des voies plus positives, il est utile de comprendre ce que sont réellement ces habitudes. 

 

« Les habitudes se forment au travers d’une reconnaissance contextuelle, c’est-à-dire qu’il faut faire la même chose dans les mêmes circonstances suffisamment de fois pour qu’une habitude se crée », explique Heather McKee, thérapeute en changement comportemental. « Les habitudes fonctionnent sur la base d’une boucle composée d’un déclencheur, d’une routine et d’une récompense. Par exemple, vous vous réveillez et vous allez aux toilettes, votre brosse à dents est là et sert de déclencheur, vous vous brossez les dents, car c’est la routine, et la récompense est une hygiène mentale positive. Ce qui est intéressant, c’est que les mauvaises habitudes ont tendance à s’installer plus facilement. »

 

Intéressant mais surtout pénible. Bien heureusement, changer ses habitudes est possible. Découvrez sept étapes pour reprogrammer facilement votre cerveau.

 

Conseil n°1 pour entraîner votre cerveau : commencez simple

« J’aime penser que casser les mauvaises habitudes, c’est comme démêler un gros nœud, car les habitudes sont des comportements enchevêtrés complexes et on ne peut pas vraiment les résoudre toutes en même temps, il faut travailler à les démêler une par une », explique Heather. Et pour toutes celles et ceux qui ont perdu des heures à démêler un collier/lacet/nœud dans leurs cheveux, vous savez que la clé du succès est de commencer par le plus petit. Pour défaire tous les nœuds, poursuit Heather, il y a trois étapes importantes :

 

« La première consiste à examiner les déclencheurs et ce qui motive ces habitudes. J’essaie de voir quand les gens sont le plus tentés de s’écarter de leurs objectifs. Nous pensons que nous cédons à la tentation de façon aléatoire, mais en fait nous avons tendance à avoir les mêmes schémas. Dans ces conditions, comprendre les déclencheurs qui nous poussent à agir de cette manière est vraiment utile. Par exemple, j’ai publié une étude dans le Journal of Health Psychology qui prouve que 15 h 30 et 20 h étaient les moments de la journée où les gens étaient le plus susceptibles de céder aux tentations du sucre ou de l’alcool. »

 

«∘La deuxième chose est qu’au lieu de se concentrer sur les solutions, par exemple “abandonner complètement le sucre”, il faut s’intéresser au moteur du comportement lui-même. Votre consommation de sucre est-elle en fait due à la fatigue, au stress ou à l’ennui ? Une fois que vous avez examiné cela, vous avez une meilleure idée de la récompense dont vous avez besoin. »

 

« Enfin, je conseille d’expérimenter avec le remplacement comportemental, c’est à dire d’identifier ce qui peut vous servir de récompense de façon plus saine. C’est là qu’il faut commencer petit. Existe-t-il une forme de sucre dans votre vie que vous n’appréciez pas ou un certain moment de la journée où il serait plus facile de le remplacer par autre chose ? Qu’est-ce qui pourrait constituer une victoire rapide ? En commençant petit, vous pouvez facilement et systématiquement vous frayer un chemin à travers la maille jusqu’à ce que le nœud de l’habitude soit libéré, cela vous donne également plus de confiance pour démêler les nœuds plus serrés et plus difficiles au fil du temps. »

 

Conseil n°2 pour entraîner votre cerveau : allez-y à votre rythme

Rome ne s’est pas construite en un jour et, selon les experts, les changements doivent être progressifs si l’on veut qu’ils soient pérennes. De plus, toutes nos excuses à ceux et celles qui pensent qu’il faut 21 jours pour rompre une habitude, mais il s’agirait plutôt de 66 ou de 122 jours, selon la complexité de l’habitude. « Le mythe des 21 jours circule depuis des années, mais il est né de recherches anecdotiques sur la chirurgie plastique et le temps qu’il a fallu aux gens pour s’adapter à leur nouveau membre ou à leur nouvelle apparence. Il faut considérer la formation d’une habitude comme un marathon et non comme un sprint, mais la bonne nouvelle est qu’avec le temps, cela devient plus facile. Et les recherches montrent qu’une fois qu’une habitude est formée, elle peut devenir automatique », explique Heather. «∘Cela signifie qu’elle fait partie de la zone inconsciente du cerveau et que vous n’avez même plus à y penser. Votre mauvaise habitude d’avant finira par être remplacée par une nouvelle, alors ne perdez pas espoir ; cela peut parfois prendre beaucoup de temps. »

 

Conseil n°3 pour entraîner votre cerveau : célébrez vos victoires

Se féliciter n’est pas toujours chose facile. Il est beaucoup plus facile de se concentrer sur ce que vous n’avez pas bien fait que sur ce que vous avez fait, mais si vous voulez mettre un terme au cercle vicieux des mauvaises habitudes, vous devez faire preuve d’indulgence envers vous-même. « La discipline est évidemment nécessaire à la répétition de comportements, mais elle doit être associée à une émotion positive », explique Heather. « Les émotions peuvent également contribuer à créer un changement d’habitude, car la dopamine que nous recevons d’un comportement gratifiant conduit à la formation d’une habitude. Si vous sentez que vous avez besoin de vous autocritiquer ou que vous êtes dur avec vous-même, la dopamine n’intervient pas et il est donc plus difficile de tenir sur le long terme. »

 

Elle utilise l’analogie d’un bébé qui apprend à marcher. En le récompensant par des applaudissements, de la dopamine est libérée dans son cerveau, ce qui lui donne envie de recommencer encore et encore. Mais la récompense doit être rapide : « la dopamine apparaît pendant moins d’une minute, donc cette récompense doit être une réponse immédiate. Chantez une chanson que vous aimez, faites un geste de la victoire, joignez les paumes de vos mains en signe de gratitude, dites-vous “je vais y arriver”, tout ce qui peut vous faire sourire immédiatement après avoir pris votre habitude. J’aime faire un battement de tambour sur mon bureau. Célébrer chaque micro-pas que vous faites est aussi une façon intelligente d’accélérer votre changement d’habitude. »

 

 

Conseil n°4 pour entraîner votre cerveau : acceptez les dérapages

Pour continuer dans la veine de la bienveillance envers soi-même, l’une des études d’Heather McKee studies montre que celles et ceux qui perçoivent l’échec comme leur allié ont plus de chances de se tenir à leurs habitudes. C’est parce qu’au lieu de se flageller, ils cherchent le «∘pourquoi∘» et enquêtent sur ce qui les a poussés à céder à la tentation. « Nous avons constaté qu’au lieu de se réprimander pour leur manque de volonté, ils ont compris que leur moment de faiblesse était temporaire et ils sont passés à autre chose », dit-elle.

 

C’est aussi là que sa technique du «∘si/quand∘» entre en jeu. Cette technique sert de plan d’action pour éviter les tentations ou vous aider à vous remettre sur la bonne voie en cas d’entorse. Elle peut tout simplement se traduire par une liste d’alternatives aux tentations que vous entrevoyez. « Si vous vous fixez l’objectif de courir plus, avant de commencer, demandez-vous ce qui pourrait faire obstacle à cette nouvelle habitude. S’il pleut, avez-vous un imperméable que vous pouvez porter ? Avez-vous une playlist géniale que vous pouvez écouter pour vous motiver ? Pouvez-vous faire un entraînement en ligne à la place ? Nous devons ouvrir notre cerveau et nos voies neurologiques pour explorer d’autres options afin de nous rendre compte que ce n’est pas tout ou rien et qu’il existe d’autres options », poursuit Heather.

 

Conseil n°5 pour entraîner votre cerveau : ajouter quelques obstacless

Cela peut sembler contre-intuitif, mais l’auteure de The Kindness Method, Shahroo Izadi, suggère qu’ajouter des obstacles permet de briser l’ancienne routine afin que de nouvelles habitudes s’installent. « Si vous essayez de faire moins d’achats en ligne, ne vous contentez pas de supprimer l’application, supprimez aussi les détails de votre carte. L’idée est d’ajouter autant de ralentisseurs que possible entre le moment où vous voulez faire quelque chose et celui où vous le faites. En s’imposant des interférences de cette manière, vous vous donnez plus de temps pour réfléchir à ce que vous faites et vous avez plus de chances de former des habitudes automatiques », dit-elle.

 

Conseil n°6 pour entraîner votre cerveau : les deux font la paire

Certaines personnes gagnent beaucoup à avoir une personne pour les soutenir dans leur parcours tandis que d’autres trouvent cela trop stressant ou intimidant. À vous de voir ce qui fonctionne pour vous. Cela vous apporte une petite référence extérieure à qui rendre des comptes. Mais la communication est clé. Dites à votre partenaire ce que vous attendez d’elle ou de lui, pour dissiper toute condescendance ou négativité. Votre partenaire ne doit en aucun cas vous sermonner ou vous remettre en question même si vous avez craqué pour une barre chocolatée ou que vous n’allez pas à la salle de sport après une interminable journée, car cela pourrait conduire à de la honte et nous savons tous que de bonnes habitudes germent de l’estime de soi !

 

Heather recommande de trouver une personne qui fait figure de modèle dans votre vie. « Par exemple, quelqu’un qui a une disciple de fer en matière de sport ou une personne qui fait des étincelles au travail. Si vous connaissez une personne qui a une petite longueur d’avance sur vous, elle peut vraiment vous motiver. Il existe également un phénomène appelé la “contagion émotionnelle”, qui consiste à reproduire les comportements d’autres personnes. »

 

Conseil n°7 pour entraîner votre cerveau : faites une introspection

Pour que vos nouvelles habitudes et routines tiennent vraiment, vous devez leur donner du poids, non pas grâce à des moyens externes comme des likes sur Facebook, un chiffre sur la balance ou le nombre de pas que vous avez fait. Ce type d’objectifs est difficile à atteindre et, même atteints, la joie qu’ils suscitent s’éteint avec le temps. « On pense souvent, à tort, que le désir de changer et l’accomplissement d’un objectif suffiront à soutenir les changements de comportement », ajoute Shahroo. « Considérez la façon dont vous vous comporterez lorsque le caractère nouveau initial du changement se sera dissipé. »

 

C’est là qu’intervient l’idée « d’objectifs intrinsèques ». «∘Intrinsèque vient du mot latin qui signifie “biens pour l’âme”. Par exemple, être en bonne santé est important parce que car cela nous permet d’avoir de l’énergie. Réussir au travail nous tient à cœur parce que nous voulons être un modèle positif pour nos enfants. Comme ces objectifs sont liés à vos valeurs et aux choses qui comptent le plus pour vous, ils sont beaucoup plus motivants à long terme et, quand il s’agit de rester sur la bonne voie, ce n’est plus une question de volonté, mais plutôt la conscience que ce que vous poursuivez fait partie de votre caractère et de votre identité », explique Heather.

 

En vous concentrant sur la façon dont ces nouvelles habitudes vous font vous sentir plutôt que de poursuivre des objectifs de courte durée, vous tiendrez sur le long terme. « L’essentiel ici est de se concentrer sur les habitudes et non sur les objectifs. Les objectifs ne sont que des instantanés dans le temps, les habitudes sont les comportements quotidiens que nous voulons adopter », conclut Heather. « Demandez-vous quelles habitudes vous aimez : boire un thé, utiliser un parfum particulier, faire une promenade... En fin de compte, ce sont ces habitudes qui vous apportent de la joie et facilitent vos choix. Vous n’aurez même plus à y penser. »